Marie-Antoinette de Habsbourg-Lorraine, née le 2 novembre 1755 à Vienne en Autriche et morte guillotinée le 16 octobre 1793 sur la place de la Révolution à Paris.
Archiduchesse d’Autriche, princesse impériale, princesse royale de Hongrie et de Bohême, elle est la dernière reine de France et de Navarre (1774-1792).
Fille de l'empereur François Ier et de Marie-Thérèse d'Autriche, reine de Hongrie et de Bohême, arrière-petite-fille de Philippe d’Orléans, le 16 mai 1770 elle épouse Louis XVI, alors dauphin de France, puis roi de France et de Navarre.
Sa mère Marie-Thérèse, comme tous les souverains de l’époque, met le mariage de ses enfants au service de sa politique diplomatique, qui vise à réconcilier, après des décennies de guerres, les Habsbourg et les Bourbons, dans le contexte du renversement des alliances et de la fin de la guerre de Sept Ans, et faire ainsi face aux ambitions conjointes de la Prusse et de la Grande-Bretagne.
Ainsi, parmi les sœurs aînées de Marie-Antoinette, seule Marie-Christine, l’enfant préféré de l’impératrice, peut épouser en 1766 - après la mort de leur père qui y était opposé - le prince Albert de Saxe, fils cadet de l'électeur de Saxe et Roi de Pologne Auguste III de Pologne et frère de la dauphine de France Marie-Josèphe de Saxe, mère du futur Louis XVI de France. Le prince cadet Saxon est même créé duc de Teschen par Marie-Thérèse. Marie-Christine et Albert sont nommés, par la suite et avec lui, régents des Pays-Bas en 1780.
En revanche, Marie-Amélie épouse contre son gré, en 1769, Ferdinand Ier, duc de Parme, et Marie-Caroline épouse en 1768 Ferdinand IV, le roi de Naples et des Deux-Sicilesb 3, après que deux sœurs successivement promises au jeune monarque furent mortes prématurémenta .
Désormais veuve depuis le décès de François Iera , extrêmement douloureux pour Marie-Antoinette, Marie-Thérèse prend en main la vie de ses filles et le mariage entre le dauphin – futur Louis XVI – et Marie-Antoinette, qui doit concrétiser la réconciliation des deux Maisons les plus prestigieuses d'Europe. Louis XV ne voit pas d'inconvénient au mariage de la princesse avec son petit-fils à condition que celle-ci soit capable de parler convenablement français.
Cela semble perdu d'avance. C'est pourquoi Mathieu-Jacques de Vermond est envoyé à la Cour pour s'occuper de la future dauphinea.
Celle-ci semble bien progressera . Elle est alors prise en charge par de grands professionnels français afin d'améliorer entre autres sa denture, alors très mauvaise, et sa coiffure.
Le 7 février 1770 au soir, Marie-Antoinette est « réglée », prête à être donnée en mariagea .
Cela ne tarde pas, le 17 avril 1770, Marie-Antoinette renonce officiellement à ses droits sur les couronnes dépendant de la Maison d’Autriche.
Le 19 avril 1770, on célèbre son mariage par procuration, à cinq heures du soir, dans l'église des Augustinsa .
Seul le mariage de Louis XIV avec l'infante d'Espagne un siècle auparavant avait eu un semblable retentissement.
Par ailleurs, on n'avait pas vu une archiduchesse d'Autriche sur le trône de France depuis Marie-Thérèse d'Autriche, épouse de Louis XIV en 1660, et une reine bien autrichienne depuis Élisabeth d'Autriche, épouse de Charles IX en 1570.
Deux jours plus tard, au petit matin, à l'âge de quatorze ans, elle quitte définitivement Viennea . Sa mère lui fait alors un grand nombre de recommandations.
De douloureux pressentiments entourent alors son départ de Vienne.
Weber dit, dans ses mémoires : « On a peine à se défendre de la superstition des pressentiments quand on a vu les adieux de Marie-Antoinette à sa famille, à ses serviteurs et à son pays, en 1770.
Hommes et femmes se livrèrent aux mêmes expressions de la douleur.

Les avenues, comme les rues de Vienne en retentirent. On ne rentrait chez soi qu'après avoir perdu de vue le dernier courrier qui la suivait, et l'on y rentrait que pour gémir en famille d'une perte commune. ».
L'impératrice sa mère semble aussi touchée par le phénomène. Une anecdote raconte que Joseph Gassner, ecclésiastique venu chercher l'asile à Vienne, se croyant inspiré par Dieu, à une question de Marie-Thérèse lui demandant comment allait sa fille, ne répondit pas, pâlit, et finit par articuler : « Madame, il est des croix pour toutes les épaules. ».
En chemin pour la France, Marie-Antoinette croise le cortège de sa tante paternelle Anne-Charlotte de Lorraine, comme toute sa famille résolument opposée à l'alliance avec la France qui a dépossédé ses ancêtres des duchés lorrains.
Marie-Thérèse demanda à Charlotte et Louise de Hesse-Darmstadt, amie de Marie Antoinette d'accompagner cette dernière en France.
Le roi Louis XV meurt le 10 mai 1774 et Marie-Antoinette devient reine de France et de Navarre à 18 ans.
Toujours sans héritier à offrir à la France et toujours considérée comme une étrangère même par la famille royale qu'elle n'aime pas (en fait le mariage entre elle et Louis XVI met sept ans à être consommé), la reine devient, dès l’été 1777, la cible de premières chansons hostiles qui circulent de Paris jusqu’à Versailles.
Une véritable coterie se monte contre elle dès son accession au trône, des pamphlets circulent, d'abord de courts textes pornographiques puis des libelles orduriers.
Ses déboires conjugaux étant publics, on l’accuse d’avoir des amants (le comte d’Artois son beau-frère, le comte suédois Hans Axel de Fersen) ou même des maîtresses (la duchesse de Polignac, la princesse de Lamballe), de dilapider l’argent public en frivolités (robes de Rose Bertin, parfums de Jean-Louis Fargeon) ou pour ses favoris, de faire le jeu de l’Autriche, désormais dirigée par son frère Joseph II.
Elle y est clouée au pilori comme une nymphomane perverse et insatiable et bien vite la certitude de son insatiable érotisme se répand.
Elle est décrite comme une « prostituée babylonienne », une « infâme tribade » ayant l'habitude, à Trianon, d'épuiser quotidiennement plusieurs hommes et plusieurs femmes pour satisfaire sa « diabolique lubricité ».
De plus, le couple royal n'arrive pas à procréer, ce qui alimente les rumeurs sur l'impuissance de Louis XVI ou la stérilité de Marie-Antoinette, rumeurs généreusement répandues par le comte de Provence qui se juge seul apte à gouverner.
Le roi se révèle en fait inexpérimenté et intimidé par sa femme avec qui il ne s'entend pas. Cette dernière, peu attirée par son époux, se montre réticente à accomplir le devoir conjugal.

Sa mère Marie-Thérèse, craignant pour la survie de l'Alliance franco-autrichienne et que sa fille puisse être répudiée, envoie son fils aîné Joseph le 19 avril 1777 à la Cour de France afin d’analyser au mieux la situation du couple.
Un an plus tard, le couple donne naissance à leur première fille, Marie-Thérèse-Charlotte mais cette naissance tant attendue apparaît suspecte et fait naître la rumeur de bâtardise de l'enfant, la paternité de la princesse étant attribuée au comte d'Artois ou au duc de Coigny.
En juillet 1785, éclate l’« affaire du Collier » : les joailliers Boehmer et Bassange réclament à la reine 1,6 million de livres pour l’achat d’un collier de diamants dont le cardinal de Rohan a mené les tractations, au nom de la reine.
La reine ignore tout de cette histoire et, quand le scandale éclate, sur demande de cette dernière, le roi exige que le nom de sa femme soit lavé de l’affront.
Le cardinal est arrêté en pleine journée dans la Galerie des Glaces, sous les yeux des nombreux courtisans.
Le roi confie l’affaire au Parlement, l’affaire est jugée par Étienne François d'Aligre, qui conclut à la culpabilité du couple d’aventuriers à l’origine de l’affaire, les prétendus « comte et comtesse de la Motte » et disculpe le cardinal de Rohan et le comte de Cagliostro, abusés mais innocents.
Le cardinal de Rohan, aussi innocent que la Reine dans cette affaire, s’est laissé manipuler par Madame de La Motte.
Le Cardinal, frivole et volubile, est ignoré par la Reine depuis qu'il a mécontenté sa mère, Marie-Thérèse, alors qu'il était ambassadeur de France à la Cour d'Autriche, des années plus tôt.
Lorsque « Madame de la Motte », qui se dit amie et cousine de Marie-Antoinette, confie au Cardinal les tractations avec le bijoutier, il se rappelle que Madame de La Motte lui a obtenu, un an auparavant, un rendez-vous avec Marie-Antoinette (en réalité, une prostituée Nicole Leguey qui ressemblait à s’y méprendre à la reine) un soir dans le parc de Versailles, au bosquet de Vénus. Elle met en route une fausse correspondance ; le naïf mais ambitieux Cardinal accepte donc sa mission avec zèle, clamant à qui voulait l'entendre qu'il était enfin devenu « intime » de Sa Majesté.

La reine, bien qu’innocente, sort de l’affaire du collier déconsidérée auprès du peuple. Non seulement l'affront ne fut pas lavé, mais il généra une réelle campagne de désinformation étendue à tout le royaume.
C'est à la même époque qu'est diffusée une littérature diffamante à propos des amours de la reine et du roi.
Parmi ces représentations, l'une fut très populaire : Les Amours de Charlot et Toinette, caricatures du couple royal (1789), un succès de librairie.
Marie-Antoinette se rend enfin compte de son impopularité et tente de réduire ses dépenses, notamment en réformant sa maison, ce qui déclenche plutôt de nouveaux éclats quand ses favoris se voient privés de leurs charges.
Rien n’y fait, les critiques continuent, la reine gagne le surnom de « Madame Déficit » et on l’accuse de tous les maux, notamment d’être à l’origine de la politique anti-parlementaire de Louis XVI.
Le jour du procés :
Quatre questions sont posées au jury :
« 1. Est-il constant qu’il ait existé des manœuvres et des intelligences avec les puissances étrangères et autres ennemis extérieurs de la République, lesdites manœuvres et des intelligences tendant à leur fournir des secours en argent, à leur donner l’entrée du territoire français et à leur faciliter le progrès de leurs armes ?
2. Marie-Antoinette d’Autriche (…) est-elle convaincue d’avoir coopéré à ces manœuvres et d’avoir entretenu ces intelligences ?
3. Est-il constant qu’il ait existé un complot et une conspiration tendant à allumer la guerre civile à l’intérieur de la République ?
4. Marie-Antoinette est-elle convaincue d’avoir participé à ce complot et à cette conspiration ? »
Aux quatre questions, le jury répond « oui ». Lorsque le jury rend son verdict, il n’existe aucune preuve de l’accusation de haute trahison que l’on impute à la reine. Le dossier est vide de toute pièce.
Acte de condamnation à mort de Marie-Antoinette par le Tribunal révolutionnaire, Archives nationales.
Techniquement, au vu des pièces du procès, la condamnation n’est pas basée sur des faits avérés.
On apprit plus tard que la reine entretenait une correspondance avec le comte Hans Axel de Fersen où il apparaît que l'Autriche et les monarchies d'Europe se préparaient à la guerre contre la France, ainsi lit-on dans une lettre du 19 avril 1792 adressée au comte que la reine écrivait : « Les ministres et les jacobins font déclarer demain au roi la guerre à la maison d'Autriche, sous prétexte que par ses traités de l'année dernière elle a manqué à celui d'alliance de cinquante-six, et qu'elle n'a pas répondu catégoriquement à la dernière dépêche.
Les ministres espèrent que cette démarche fera peur et qu'on négociera dans trois semaines. Dieu veuille que cela ne soit point et qu'enfin on se venge de tous les outrages qu'on reçoit dans ce pays-ci!»
La reine, captive, n'était pour autant personnellement pas en mesure d'organiser ou d'ordonner directement quelque directive militaire que ce soit. Sa correspondance avec le comte de Fersen indique néanmoins qu'elle y incite par divers courriers.
En réalité, il fallait condamner la « veuve Capet ». Robespierre a donc intégré au jury le médecin qui soignait la reine à la Conciergerie, Joseph Souberbielle, lequel a indiqué aux autres jurés que de toute façon Marie-Antoinette était médicalement condamnée à brève échéance, car elle avait de forts épanchements sanguins.
La condamnation à mort, pour haute trahison, est prononcée le 16 octobre 1793 vers 4 heures du matin.

À l'annonce de la sentence, Marie-Antoinette rédige une dernière lettre à l'attention de Madame Élisabeth, sœur de feu le roi Louis XVIn 1.
Cette lettre, qui n'est jamais parvenue à sa destinataire, a été conservée par Robespierre, puis récupérée par le conventionnel Courtois, avant d'être saisie par Louis XVIII.
Elle est aujourd'hui conservée dans « l'armoire de fer » des Archives nationales (cote AE/II/1384) et un fac-similé est exposé au Musée des Archives nationales.
Cette lettre, à usage privé, ne contient aucun message d'ordre politique. Marie-Antoinette l'a rédigée dans son cachot de la Conciergerie juste après l'annonce de sa condamnation.
L'en-tête porte la mention :
« Ce 16 octobre, 4 heures 1/2 du matin38. »
Elle n'est pas signée et ne mentionne aucun nom propre même pas celui de sa destinataire la sœur de Louis XVI, qui partage la captivité des enfants royaux au Temple :
« C'est à vous, ma sœur, que j'écris pour la dernière fois ; je viens d'être condamnée non pas à une mort honteuse, elle ne l'est que pour les criminels, mais à aller rejoindre votre frère. Comme lui innocente, j'espère montrer la même fermeté que lui dans ces derniers moments. Je suis calme comme on l'est quand la conscience ne reproche rien ; j'ai un profond regret d'abandonner mes pauvres enfants ; vous savez que je n'existais que pour eux, et vous, ma bonne et tendre sœur, vous qui avez par votre amitié tout sacrifié pour être avec nous, dans quelle position je vous laisse ! J'ai appris par le plaidoyer même du procès que ma fille était séparée de vous. Hélas ! la pauvre enfant, je n'ose pas lui écrire, elle ne recevrait pas ma lettre, je ne sais même pas si celle-ci vous parviendran , recevez pour eux deux ici ma bénédiction. J'espère qu'un jour, lorsqu'ils seront plus grands, ils pourront se réunir avec vous, et jouir en entier de vos tendres soins. »
Malgré son exécution très proche et son isolement, Marie-Antoinette récuse d'avance toute assistance d'un prêtre assermenté qui aurait prêté le serment de fidélité à la Constitution civile du clergé condamnée par Rome :
« Je meurs dans la religion catholique, apostolique et romaine, dans celle où j'ai été élevée, et que j'ai toujours professée, n'ayant aucune consolation spirituelle à attendre, ne sachant pas s'il existe encore ici des prêtres de cette religion, et même le lieu où je suis les exposerait trop s'ils y entraient une fois. Adieu, adieu !
Je ne vais plus m'occuper que de mes devoirs spirituels. Comme je ne suis pas libre dans mes actions, on m'amènera peut-être un prêtre, mais je proteste ici que je ne lui dirai pas un mot,et que je le traiterai comme un être absolument étranger. »
Celle qui vient de vivre seule une captivité de deux mois et demi, sans pouvoir communiquer avec ses enfants, tente de leur faire passer ses dernières recommandations.
La femme autrefois décrite comme autoritaire et superficielle s'exprime à ce dernier instant en toute humilité. Sa préoccupation essentielle concerne l'état d'esprit dans lequel ses enfants assumeront la mort de leurs parents, dans leur vie à venir dont elle ne veut pas douter, alors que le dauphin mourra en captivité. Sans un mot de plainte ni de regret, Marie-Antoinette ne songe plus qu'à laisser un héritage spirituel à ses enfants :
« Qu'ils pensent tous deux à ce que je n'ai cessé de leur inspirer : que les principes et l'exécution de leurs devoirs sont la première base de la vie ; que leur amitié et leur confiance mutuel en fera le bonheur ; (...) qu'ils sentent enfin tous deux que, dans quelque position où ils pourront se trouver, ils ne seront vraiment heureux que par leur union, qu'ils prennent exemple de nous : combien dans nos malheurs, notre amitié nous a donné de consolations, et dans le bonheur on jouit doublement quand on peut le partager avec un ami ; et où en trouver de plus tendre, de plus cher que dans sa propre famille. »
Le dernier conseil n'est pas celui de l'« Autrichienne » perverse que le Tribunal s'efforcera de montrer pour justifier la condamnation à mort :
« Que mon fils n'oublie jamais les derniers mots de son père que je lui répète expressément, qu'il ne cherche jamais à venger notre mort. » et plus loin « Je pardonne à tous mes ennemis le mal qu'ils m'ont fait. Je dis ici adieu à mes tantes et (mots rayés) et à tous mes frères et sœurs. » Resteront sans doute de cette lettre retrouvée en 1816 ces mots touchants39 : « Mon Dieu ayez pitié de moi ! Mes yeux n'ont plus de larmes pour pleurer pour vous mes pauvres enfants. Adieu, Adieu ! »
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